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C’est la fin du jour, l’heure où les mouches vrombissent moins fort au milieu des criquets qui, eux n’abandonnent pas si facilement. Le soleil est moins puissant, mais la fraîcheur se fait encore attendre. Il n’y a pas de chants d’oiseaux qui sont à l’abri de la chaleur et attendent encore, avec parfois, un pépiement hésitant. Le bourdonnement des insectes rend le silence encore plus intense. L’homme soupire et se laisse tomber lourdement sur le sol. Il sort un grand mouchoir, un immense carré de tissu usé et il essuie d’un mouvement rond et rapide son visage, ses yeux et entoure son cou. La sueur qui coulait est arrêté brutalement dans son mouvement. Sa casquette délavée est marquée de grandes auréoles humides. Ses sourcils poivre et sel sont touffus et semblent tomber sur ses yeux plissés par la lumière.

 

Son dos est arc-bouté sous le poids de la fatigue de la journée. Il a fait si chaud, encore une fois. Il attrape la bouteille de vin que sa femme a laissé dans le panier, à l’ombre des arbres. Un « plop » sonore explose près de son oreille lorsqu’il tire sur le bouchon de liège. Il s’empare du verre transparent qui tinte légèrement en heurtant l’anse. Malgré la fatigue, malgré les douleurs de son dos rompu, malgré les muscles du corps qui se révoltent, il est heureux. Il balaie l’espace d’un coup d’œil et regarde avec fierté SA terre. « Je deviens vieux, » se dit-il, « et je ne sais pas ce que deviendra tout mon travail, ma ferme. Personne ne reprendra derrière moi. Mais au moins, avec la Femme, on a travaillé dur et honnêtement toute notre vie. Et malgré les emprunts, les difficultés, les enfants à élever et la vieillesse qui arrive, on est encore là ! »

 

Les ombres de la fin de la journée grandissent et rampent sur le sol et les reliefs. Un vent frais qui se lève en un souffle tout doux le fait frissonner. Ses mains calleuses et sèches d’homme qui a travaillé durement pendant toute sa vie caressent l’herbe jaunie qui repousse au bord de cette terre grasse et belle aux mottes épaisses. Il sait que la vie arrivera très vite à son terme, à l’âge qu’il a. Mais son bonheur et sa fierté sont là, devant lui. Et ses lèvres fines souvent serrées dans l’effort et les décisions graves à prendre s’ouvrent avec hésitation pour finir par s’étirer dans un sourire qui tranche dans ce visage aux traits un peu durs de ceux qui vivent dans la certitude.

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